Les mois ont passé à l’HDJ qui, à l’image de la psychanalyse, sombre continuellement dans une sombre et interminable agonie. L’équipe éducative et infirmière, au comble de l’épuisement et du désespoir, semble toujours isolée et menée par des personnes et des principes qu’elle ne comprend ni ne digère toujours pas. Même lorsque la valse des démissions successives s’arrête, les départs sont organisés et étalés tout au long de l’année par les instances supérieures. A commencer par cet éducateur pris par des difficultés personnelles que l’on essaiera purement et simplement de virer pour motif de psychose au sens psychanalytique et structural du terme. Il ne s’agit alors ni de délire ni d’une incapacité intellectuelle ou physique à travailler mais bien d’une façon de réagir au monde extérieur originale qui est condamnée publiquement. Bien entendu, nous sommes au cœur du secteur public de santé mentale et cette demande émanant du médecin chef de l’HDJ n’a pas été entendue… La crédibilité de ce médecin chef, en baisse permanente depuis des années, s’est encore amoindrie après la décision de faire partir une éducatrice en plein milieu d’année. La démarche était tout simplement d’éviter le départ conjoint de deux éducateurs à la fin de l’année en les séparant ces départs de 6 mois. Il n’y aura cependant pas de remplaçante en raison de distorsions administratives multiples. L’équipe est donc tout simplement amputée gratuitement jusqu’à la fin de l’année.
Entre décisions subtiles et stupides, cette incroyable femme médecin chef se refuse toujours publiquement à la remise en question et à la démission, qui semble au yeux de tous la meilleure solution depuis bien des années…
A la manière d’un docteur Quinn de la grande époque, elle se refuse à changer d’un iota sa ligne de conduite qui devient donc logiquement celle de l’HDJ tout entier pour son plus grand malheur. Les deux psychologues, dans une situation plutôt confortable, loin d’avoir les mains dans le cambouis, tentent de mimer de façon très théâtrale un statut de « cul entre deux chaises ». Cette vieille femme, souvent mal à l’aise face à moi, ne cesse de rappeler, face aux diverses critiques, les nombreuses réunions et supervisions qui ont été mises en place depuis le début de l’année. Elle ne parvient pourtant pas à comprendre que ces mesures, aussi utiles soient-elles, ne sont que palliatives. Pire, ces mesures pourraient même jouer en sa défaveur en favorisant une rumination permanente des nombreux problèmes institutionnels et des critiques non moins perpétuelles et justifiées envers le Dr Quinn.
Le second psychologue est probablement LE véritable psychotique de la structure. Psychologue sud-américain dans la plus pure tradition lacanienne, cet homme ne semble agir et parler que par bizarreries. Ses entrées surprises au sein des groupes d’enfants nous ont d’abord interloqués, puis inquiétés et enfin franchement irrités. Lors de ses survenues, cet homme ramène également son inadaptation la plus totale et peut autant squatter une chaise en regardant le mur pendant des heures que tenir la main d’un enfant en regardant ses pieds, tout cela sans dire le moindre mot. La perplexité ne peut qu’envahir n’importe quel être humain se trouvant dans la même pièce. Certains éducateurs étant des authentiques psychologues surdiplômés n’ayant trouvé aucun poste, nul doute que la stratégie de recrutement de l’HDJ doit leur paraître… Psychotique? Non…
Revenons sur ce fameux Dr Quinn. Cette femme, non seulement dénuée de la moindre capacité de gestionnaire responsable, possède des compétences cliniques quasi-nulles. Et même dans le monde obscur de la pédopsychiatrie, les problèmes s’empilent les uns sur les autres. Ses entretiens d’accueil ne parviennent plus à berner les parents qui refusent désormais pour la plupart de laisser leur enfant aux mains d’une telle théorie. Aussi incroyable que tout cela puisse paraître, ces parents préfèrent supporter un enfant autiste ou psychotique à plein temps, que de le laisser la journée dans un tel centre de jour. La raison principale est évidente. Comment peut réagir un parent quand un authentique médecin lui affirme avec une conviction toute convertie qu’il a rendu son enfant autiste à cause d’un rapport parent-enfant défectueux, alors que même la dernière des concierges de son immeuble est au courant de l’origine génétique certaine de l’autisme. Avouons que tout cela est d’un pathétique à pleurer…
Elle ne s’arrête pourtant pas là et sombre fréquemment dans le syndrome de sur-diagnostic de psychose (SSP). Ainsi un petit garçon tout simplement timide et inhibé s’est vu marqué psychotique au fer rouge sous prétexte d’une écholalie au cours de l’entretien (répétition d’un mot) et d’une pauvreté du discours. Ce qui n’est qu’une pure conviction sans le moindre esprit critique scientifique s’est vue renforcée par l’émergence d’une phobie de la saleté. Cet enfant semblait en effet particulièrement mal à l’aise lorsqu’il constatait des éléments de saleté sur le sol et me demandait frénétiquement de chasser la poussière et la terre de sa vue. Argument psychotique évident pour notre chère et tendre Dr Quinn qui n’envisagera pas une seconde une autre possibilité diagnostique malgré l’insistance de son interne (à savoir moi) et de l’éducateur référent…
Durant ces entretiens d’entrée passionnants, je me surprends à rêver, à m’imaginer me lever brutalement et hurler aux parents : « Fuyez! Fuyez! Et ne revenez jamais! Votre enfant ne mérite pas ça… ».
Mais ces parents n’ont pas besoin de ça pour refuser l’admission de leur bambin. Je me souviens encore de ce père, adorable et fier afro-français affichant son surpoids et son humour, mais qui, au bout d’une heure d’entretien, parvenait à affirmer avec calme, intelligence et subtilité qu’il ne laisserait pas son enfant ici avec des arguments d’une pertinence rare. J’aurais voulu l’embrasser, je ne me suis contenté que d’un gentil clin d’œil à son départ… Durant le débriefing, le Dr Quinn, visiblement persécutée par ce refus, en manque de confiance permanent, s’est laissée aller à son SSP, traitant cet homme subtil de paranoïaque agressif et dangereux. Projection?
Et les enfants de l’HDJ dans tout ça? Et bien ils vont globalement tous mieux, légèrement mieux. A mon avis, pour une bonne raison : ils grandissent, ils évoluent entre eux, subissent des séances de psychomotricité et d’orthophonie, jouent avec les éducateurs restant, mangent, sortent quand ils peuvent, rentrent dans leur famille etc.
Et cette foutue psychanalyse n’a rien à voir la dedans.
Pathétique persévération…
A suivre